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Département de Géographie

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Entre riziculture et saliculture : l’enjeu de la maîtrise de l’eau en Camargue


La Camargue est un espace de faible densité humaine, contraint par les crues du fleuve et par le sel apporté par la mer. Pour répondre aux crues, de multiples ouvrages ont été édifiés le long des bras du fleuve, gérés par divers syndicats d’assainissement. Pour se protéger du sel, les cultures sont préférentiellement implantées dans la Haute-Camargue, où l’influence maritime est moins vigoureuse. Les bourrelets alluviaux sont les premiers sols mis en valeur. A proximité de la commune d’Arles, les vergers ont aujourd’hui colonisé ces levées. Surtout, la faible altitude de la Camargue et son organisation en casiers facilitent la mise en eau des cultures. Les vignes sont ainsi inondées durant quarante à cinquante jours au cours de l’hiver afin de lutter contre l’invasion du phylloxera à la fin du XIXe siècle. En 1942, les flux de riz en provenance d’Indochine cessent, la riziculture croît en Camargue. Au sortir de la Seconde Guerre Mondiale, des travaux hydrauliques sont réalisés favorisant ainsi l’irrigation des rizières. En effet, les champs sont immergés d’avril à septembre sous quatre à dix centimètres d’eau. L’irrigation nécessite la maitrise complexe du circuit d’adduction depuis le pompage des eaux du Rhône, leur parcours dans les roubines et les porte-eaux, mais aussi de leur évacuation des rizières irriguées. Les eaux évacuées, dites de colature, sont par la suite assainies et rejetées dans le Rhône et dans les étangs de Moyenne-Camargue. 

Photographie : roubine qui conduit l’eau pompée du Rhône jusqu’aux cultures. © N. Toraille, 2011 

A la faveur du soleil estival, le sel est produit en Basse-Camargue, où la teneur en sel est de 30 grammes par litre d’eau en moyenne. Son exploitation est une activité ancienne, en particulier aux environs d’Aigues-Mortes, mis en valeur depuis le haut Moyen Age. Mais c’est au milieu du XIXe siècle que l’activité acquière un caractère industriel. Deux sites, propriétés de la Compagnie des Salins du Midi et de l’Est (CSME), sont consacrés à la saliculture : à l’ouest, les salins d’Aigues-Mortes produisent un sel alimentaire tandis qu’à l’est, les salins de Giraud offrent un intrant essentiel aux industries chimiques. Les salins de Giraud profitent au milieu du XIXe siècle des travaux d’endiguement décidés à la suite des inondations de 1856. En 1973, les salins se déploient sur 11 000 hectares. 240 kilomètres de digues organisent la circulation des eaux salées au long de leur parcours dans quatre-vingt-sept étangs. Les rejets importants d’eau douce des viticulteurs puis des riziculteurs enveniment jusqu’en 1927 les questions de gestion de l’eau en Camargue.

Depuis le début des années 2000, le site des Salins de Giraud a connu une forte restructuration de ses activités. D’abord, l’exploitation des gisements de sel gemme concurrence fortement les productions salicoles du groupe. L’isolement du site et la lutte contre l’érosion entraînent des surcoûts de production. Le groupe préfère alors investir sur ses autres sites, comme celui de Zarzis en Tunisie. Enfin en 2005, Total décide de la fermeture de l’usine de Saint-Auban, située à 180 kilomètres en amont du fleuve. L’usine achetait 250 000 tonnes de sel, soit 35 à 40 % de la production des salins de Giraud pour l’électrolyse. Les salins de Giraud perdent alors leur lien avec l’industrie chimique. Aujourd’hui, le site produit 360 000 tonnes de sel par an, utilisées pour le déneigement des routes. La fin de l’exploitation salicole de ces espaces oblige à repenser leurs modalités de protection. Depuis 2008, le Conservatoire du Littoral a acquis 6 575 hectares au groupe CSME.

Photographie : Les salins de Giraud. Sur la gauche se situe la table salante, espace central de stockage du sel récolté dans les bassins présents sur la droite de la photographie. A l’arrière plan, les bassins, de couleur rose, présente une salinité élevée, proche de la saturation (260 grammes par litre). Seules des plantes halophytes, à l’origine de cette couleur, survivent. © E. Libourel, 2011 

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